Appel à l’arrêt immédiat de l’approvisionnement des réseaux de protoxyde d’azote (N2O) dans les établissements de santé : une mesure urgente pour réduire les émissions de gaz à effet de serre

Date de publication : 11 Octobre 2024
Date de modification : 11 Octobre 2024
Dans le cadre de son engagement en faveur de la transition écologique du système de santé, la Fédération Hospitalière de France (FHF) appelle à l’arrêt définitif des réseaux de protoxyde d’azote (N2O) dans les hôpitaux, et à l’interruption immédiate de leur approvisionnement.

Déjà défendue dans ses propositions n°19 et 28 publiées en novembre 2023[1], et reprise par la Feuille de route Planification écologique du système de santé (PESS)[2], cette décision s'appuie sur les recommandations de la Société Française d’Anesthésie-Réanimation (SFAR) ainsi que sur des données scientifiques récentes démontrant l’impact environnemental considérable de ces réseaux.

 

Le N2O : un polluant puissant, persistant et superflu

 

Le protoxyde d’azote est l’un des principaux responsables de la destruction de la couche d’ozone et un gaz à effet de serre 265 fois plus polluant que le dioxyde de carbone (CO2), doté d’une durée de vie dans l’atmosphère d’environ 120 ans.

Son utilisation dans les hôpitaux engendrerait l’émission de plus de 100 000 tonnes de CO2 équivalent par an, soit l’équivalent de 500 millions de kilomètres parcourus en voiture. Cette pollution est d’autant plus préoccupante que les fuites (80%) dépassent largement les quantités de gaz réellement utilisées pour les soins anesthésiques (20%), contribuant à un gaspillage et des émissions démesurés. Ainsi, même la réduction ou l’arrêt de l’utilisation ne réduit pas significativement la pollution si les réseaux continuent à être approvisionnées.[3]

 

Une position sans équivoque de la SFAR

 

En raison de son impact environnemental majeur et de son faible bénéfice clinique, la SFAR, (Société Française d’Anesthésie Réanimation) déconseille depuis plusieurs années son utilisation[4], et s’est déjà fermement positionnée contre l’installation systématique de réseaux de N2O dans les nouvelles constructions hospitalières. A l’aune des nouvelles données scientifiques précédemment citées concernant les fuites des réseaux, la SFAR demande donc le démantèlement de tous réseaux existants.

 

La FHF soutient pleinement ces recommandations et rappelle qu’aucune réglementation en vigueur n’exige l’installation de réseaux de N2O dans les blocs opératoires. Au contraire, la décision d’installer ou de désinstaller ces réseaux doit être prise en concertation avec les équipes médicales et les professionnels de santé, en tenant compte des besoins spécifiques de chaque établissement ainsi que des impératifs environnementaux.

 

Une alternative envisageable

L’arrêt des réseaux de N2O ne signifie pas la fin de l’utilisation du protoxyde d’azote en milieu hospitalier. Des solutions alternatives existent, notamment par l’utilisation de bouteilles individuelles de N2O, déjà largement utilisées en France. Cette méthode permet de réduire l’usage ainsi qu’un contrôle plus précis de l’administration du gaz, en évitant les pertes par fuites massives observées sur les réseaux centralisés.

Les praticiens souhaitant continuer à utiliser le N2O peuvent donc s’appuyer sur cette alternative sans changer radicalement leurs pratiques tout en contribuant à une réduction substantielle des émissions de GES.

 

Des précédents étrangers

S’inspirant des initiatives lancées par le NHS au Royaume-Uni avec son projet « Nitrous Oxide Project », qui vise à identifier les pertes de gaz et à améliorer la gestion du N2O de manière multidisciplinaire, la FHF appelle à faire de la réduction des émissions de gaz médicaux à fort effet de serre, comme le protoxyde d’azote, une priorité, au même titre que ses autres propositions en la matière.

 

Ainsi, dans l’esprit de la Feuille de route nationale PESS qui appelait également à l’interdiction de la construction des réseaux de N2O dans les nouveaux projets immobiliers en 2025, cette action à très fort impact permettra de concrétiser encore davantage la politique nationale visant à limiter l’impact environnemental du système de santé tout en garantissant la qualité et la pertinence des soins.


[1] FHF, L’urgence d’agir pour préserver la santé de demain : 50 propositions à l’usage de tous les acteurs de la transition écologique en santé, pp. 41 et 52.

[2] France Nation Verte, Feuille de route Planification écologique du système de santé, décembre 2023, p. 27 

 

[3] Seglenieks R, Wong A, Pearson F, McGain F. Discrepancy between procurement and clinical use of nitrous oxide: waste not, want not. Br J Anaesth 2022; 128: e32e4

Hafiani EM, Teilhet M, Camus F, El Maleh Y, Burey J, Taconet C, Quesnel C. Evaluation of a protocol to reduce the environmental impact of anaesthetic gases. Br J Anaesth. 2023 Nov 16:S0007-0912(23)00581-0. doi: 10.1016/j.bja.2023.10.026. Epub ahead of print. PMID: 37980181.

 

[4] Pauchard JC, Hafiani EM, Bonnet L, Cabelguenne D, Carenco P, Cassier P, Garnier J, Lallemant F, Pons S, Sautou V, De Jong A, Caillard A. Guidelines for reducing the environmental impact of general anaesthesia. Anaesth Crit Care Pain Med. 2023 Oct;42(5):101291. doi: 10.1016/j.accpm.2023.101291. Epub 2023 Aug 9. PMID: 37562688.

 

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