Dégradation historique de la situation financière des hôpitaux

Date de publication : 21 Avril 2006
Date de modification : 21 Avril 2006

PARIS, 20 avril (APM) - Le président de la Fédération hospitalière de France (FHF), Claude Evin, a évoqué jeudi une "dégradation historique" de la situation financière des hôpitaux, évaluant à 1,5 milliard d'euros le manque de financement pour 2006.

"Hier, à l'occasion de la présentation des comptes de la sécurité sociale, Xavier Bertrand disait que la décélération des dépenses d'assurance maladie était historique. Moi aujourd'hui je peux dire que la dégradation de la situation financière des hôpitaux est aussi historique", a déploré Claude Evin, lors d'une conférence de presse sur la situation budgétaire des hôpitaux.

Dans l'hypothèse d'une simple reconduction des moyens, la FHF évalue le manque de financement à 1 milliard d'euros en 2006. Cette estimation atteint 1,5 milliard d'euros si elle tient compte des mesures nouvelles demandées dans le cadre des plans de santé publique.

Par ailleurs, le président de la FHF a indiqué que les reports de charges ne sont pas permis dans la nouvelle présentation budgétaire, l'état prévisionnel de recettes et de dépenses (EPRD). Outre le calendrier serré, "la nouvelle procédure fait donc que nous allons subir une pression plus forte cette année de la part des ARH", a-t-il souligné.

Une petite enquête lancée auprès des centres hospitaliers universitaires (CHU), hors Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), montre que 18 des 21 établissements ayant répondu s'apprêtent à présenter des comptes de résultat prévisionnels déficitaires à leur conseil d'administration, a indiqué le président de la conférence des directeurs généraux de CHU, Paul Castel.

Pour lui, la situation est "extrêmement préoccupante". Comme la FHF, Paul Castel demande la délégation de l'ensemble des crédits 2006 afin de donner de la visibilité aux établissements.

Dans les centres hospitaliers (CH), la situation ne semble pas meilleure.

"Ce qu'un CH médian pouvait gagner avec le passage de la tarification à l'activité (T2A) de 25% à 35%, ça lui a été enlevé par la baisse de 1% des tarifs", a expliqué le président de la conférence des directeurs de CH, Angel Piquemal.

"En plus, il faut ajouter les prélèvements liés au plan d'économies de l'assurance maladie et les prélèvements effectués sur les missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (Migac) pour constituer les marges régionales, ce qui se traduit donc par une baisse globale", a-t-il ajouté.

Pour l'ensemble des établissements, "en nous mettant cette chape de plomb, on est en train de tuer la réforme", a dénoncé Claude Evin.

Le délégué général de la FHF, Gérard Vincent, a indiqué à l'APM que la fédération a lancé un recensement des déficits dans les établissements de santé.

L'AUGMENTATION D'ACTIVITE PAS TOUJOURS POSSIBLE

Une des solutions pour trouver de nouvelles recettes pourrait passer par une augmentation de l'activité.

Toutefois, Claude Evin a indiqué que les 2,6% d'augmentation d'activité prévus en 2006 par le ministère seront déjà difficiles à atteindre et que la fédération a plutôt tablé sur une hausse de 1%.

Pour Angel Piquemal, cette solution n'est pas réalisable car les établissements ne sont pas toujours sur des bassins de population leur permettant d'augmenter leur activité. Il est aussi difficile de réduire encore la durée moyenne de séjour.

Le président de la conférence des présidents de commission médicale d'établissement (CME) de CH, Francis Fellinger, a mis en garde contre l'effet des augmentations d'activité visant à récupérer des recettes. Ces augmentations artificielles entraîneront une baisse des tarifs dans le cadre de la régulation prix-volume, ce qui risquerait de faire entrer les hôpitaux dans un "cycle infernal".

S'agissant de l'enveloppe régionale d'aide à la contractualisation dont disposeront les ARH, ses modalités d'attribution ne sont pas définies clairement et les établissements ne pourront probablement pas systématiquement compter dessus pour équilibrer leur budget.

"Nous n'avons aucune clarté sur l'utilisation de cette enveloppe et elle risque d'avoir un caractère discrétionnaire pur et dur", a indiqué Francis Fellinger.

Angel Piquemal craint qu'une part importante des crédits soit attribuée à des établissements qui auraient dû être restructurés.

LE RECOURS A L'EMPRUNT PAS ENVISAGEABLE

Francis Fellinger a évoqué la solution de l'endettement ou du gel des investissements pour tenter d'équilibrer les recettes et les dépenses, mais il a aussitôt écarté cette solution car elle risquerait aussi de faire entrer les établissements dans un "cercle vicieux".

Tous les représentants de la communauté hospitalière se sont accordés pour dire que cette solution compromettrait l'avenir des hôpitaux.

Interrogé sur un éventuel recours à l'emprunt, Claude Evin a rejeté vivement cette possibilité, la qualifiant de "politique de courte vue". "Nous ne pouvons pas endetter les hôpitaux sur les générations futures", a-t-il ajouté.

"L'investissement est un élément majeur de la stratégie hospitalière, si nous y touchons, nous détruisons le socle des établissements" à court terme, a renchéri Angel Piquemal.

DECOURAGEMENT DES MEDECINS

Les représentants des conférences de présidents de CME, Francis Fellinger pour les CH et Gérard Janvier pour les CHU, ont mis en garde contre un découragement des médecins lié à la rigueur budgétaire.

Gérard Janvier a indiqué que les responsables de pôle sont "furieux" car il leur est demandé de s'investir et d'être performants alors que les budgets sont réduits.

Il a également souligné l'incohérence du calendrier associé à l'EPRD par rapport au recrutement des postes médicaux.

Alors que les étudiants sortent formés en juillet, il faudrait leur demander d'attendre jusqu'en mai l'adoption de l'EPRD pour pouvoir les recruter, a-t-il dénoncé en indiquant que cette situation favorise le départ des jeunes médecins vers le secteur privé.

cb/cd/APM polsan

CBJDK003 20/04/2006 18:27 ACTU

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