- Quelle est la spécificité du service de santé des armées ?
Le service de santé des armées (SSA) assure le soutien médico-chirurgical des forces armées en opération, c'est sa raison d'être depuis plus de trois siècles. Nos soldats sont exposés, dans l'exercice de leurs missions, à des risques sanitaires divers et majeurs. Il est de notre devoir, à tous, de leur garantir un soutien santé de la meilleure qualité possible en tous lieux et en toutes circonstances.
Au fil du temps, les personnels du SSA ont acquis et entretenu des compétences spécifiques pour prendre en charge, souvent au plus près des combats, les blessés de guerre, parfois en grand nombre. Ainsi, les blessures par arme de guerre, la gestion des afflux massifs, les traumatismes psychiques, les maladies infectieuses (qui ont fait, dans l'histoire de nos armées, plus de victimes que les combats eux-mêmes), ou encore le risque nucléaire, radiologique, bactériologique et chimique sont-ils progressivement devenus des domaines d'expertise du service de santé.
Ces savoir-faire, éprouvés sur tous les théâtres d'opérations extérieures où sont déployées nos forces, peuvent aussi bénéficier à tous les citoyens en cas de crise survenant sur le territoire national, comme ce fut le cas lors des attentats de 2015. A ce titre, la contribution du SSA à la gestion de situations sanitaires exceptionnelles, en relation très forte avec l'ensemble des acteurs de notre système national de santé, peut-elle s'avérer précieuse. A la seule condition cependant d'être bien préparée en amont. Ce qui impose de mieux se connaître!
- En quoi le service de santé des armées est-il déjà un partenaire de la santé publique ?
Depuis fort longtemps les hôpitaux d'instruction des armées (HIA) accueillent des patients civils des territoires de santé dans lesquels ils sont implantés. Ceux-ci représentent jusqu'à près de 80% de leur patientèle contribuant ainsi, et de manière indispensable, au maintien des compétences des équipes soignantes militaires grâce à un exercice régulier. Les autres composantes du SSA (médecine des forces, ravitaillement sanitaire, formation et recherche) sont également engagées dans des partenariats avec de nombreux acteurs de la santé publique. Cependant, ces partenariats sont encore très souvent construits en opportunité et restent le fait d'initiatives individuelles ; donc fragiles et non pérennes.
Le modèle "SSA 2020", qui fixe les ambitions et l'organisation du service de santé des armées pour les années à venir, met très fortement l'accent sur l'ouverture au monde de la santé publique. C'est désormais de manière institutionnelle, c'est à dire globale, structurée et formalisée, que nous allons la vivre.
La loi de modernisation de notre système de santé du 27 janvier 2016 a consacré la place de nos HIA comme acteurs à part entière, avec les hôpitaux publics, du service public hospitalier. De ce fait, elle nous engage à développer des partenariats encore plus étroits jusqu'à imaginer, pour certains de nos hôpitaux, la création d'ensembles hospitaliers universitaires civilo-militaires.
Les centres médicaux des armées, positionnés au plus près des unités militaires, assurent la médecine de premier recours ; ils vont eux aussi développer et formaliser des partenariats plus resserrés avec les acteurs de santé de leur environnement territorial. L'objectif de ces derniers est de contribuer au maintien des compétences de leur personnel dans certains domaines comme la pratique de l'urgence et de construire des parcours de soins civilo-militaires performants pour la communauté de Défense.
Par ailleurs, la gestion des situations sanitaires exceptionnelles que j'évoquais tout à l'heure nous donne l'opportunité de renforcer davantage les synergies existantes. Les complémentarités entre acteurs militaires et civils se sont révélées particulièrement utiles pour faire face aux urgences et crises sanitaires auxquelles nous avons été récemment confrontés, à l'instar de l'épidémie de fièvre à virus Ebola ou des attentats de l'an dernier. Il convient de rappeler que, dans ces situations graves, toutes les composantes du SSA se sont mobilisées au profit des populations civiles.
- Quels sont les axes d’effort pour les prochaines années ?
Le SSA doit poursuivre sa dynamique d'ouverture vers le service public de santé car elle est nécessaire à la mise en œuvre de son nouveau modèle de service, dont elle est d'ailleurs l'une des caractéristiques majeures.
La consolidation et la formalisation des travaux actuellement menés en partenariat avec l'ensemble des acteurs civils du système de santé, tant au niveau local, régional, que national, sont pour nous des objectifs majeurs. A ce titre, la rédaction puis l'application des textes normatifs, notamment l'ordonnance prévue par l'article 222 de la nouvelle loi de santé, représentent des jalons décisifs du processus d'ouverture.
Une étape essentielle sera prochainement franchie avec la signature du protocole d'accord interministériel voulu et annoncé par les ministres de la Santé et de la Défense le 2 décembre 2015. Selon moi, cet accord officialisera la profonde évolution des relations entre le SSA et le service public de santé. La réorganisation de l'offre de soins ainsi que les risques nouveaux qui pèsent sur notre sécurité nationale font de ce rapprochement inédit une démarche précieuse pour la qualité du service rendu à la population comme pour le renforcement du lien entre l'Armée et la Nation.
Car il nous appartient à nous, professionnels de santé, de faire vivre ensemble l'esprit de Défense qui a toujours su réunir civils et militaires dans l'histoire de notre pays, chaque fois que cela a été nécessaire. S'il en était besoin, les commémorations de la Grande Guerre nous le rappellent chaque jour.
- Qu’attend le directeur central du SSA du partenariat avec la FHF ?
Le Service de santé des armées développe un partenariat fort avec la FHF. En effet, la FHF, du fait de sa légitimité vis-à-vis des autorités de santé (ministère et ARS) et de sa très forte représentativité auprès des hôpitaux publics, constitue un appui déterminant pour accompagner le SSA dans son mouvement d’ouverture