Le constat est sans appel. Entre 2008 et 2018, les établissements financés sous dotation annuelle de financement (essentiellement publics) ont connu une progression de leur financement de +12,7%, soit moins que l’inflation et 2 fois moins que l’augmentation du budget national dédié à la santé (ONDAM) sur la même période. A contrario, le financement des établissements privés lucratifs a quant à lui augmenté de +46,9% sur cette même période, soit un écart de plus de 30 points entre les deux secteurs. Cette forte hausse pour le secteur privé lucratif s’accompagne d’une hausse du taux de rentabilité pourtant très élevé des cliniques privées, de l’ordre de 8,5% en 2018[1].
A propos de la psychiatrie, la Cour des comptes dresse le constat suivant : ces évolutions « sont le reflet de l’absence de priorité politique donnée à ce secteur pendant de nombreuses années ». Par conséquent, la faiblesse des ressources allouées au secteur public « a conduit les ARS à se retourner vers les cliniques privées pour augmenter l’offre de soins » puisqu’elles étaient en incapacité de le faire pour le secteur public. Face à ces conclusions accablantes, il est urgent de répondre aux attentes d’un secteur public à la fois mal et sous-financé.
La FHF déplore de longue date cette absence de vision stratégique pour la psychiatrie publique et les conséquences néfastes bien connues qui en résultent en matière d’offre de soins et de réponse aux besoins de santé des territoires. Et ce, d’autant que la crise épidémique entraîne l’apparition de nouveaux troubles qui appellent une réponse en termes de santé publique. Une étude récente estime en effet à 20% la part de patients atteints de la Covid-19 qui développent un trouble psychiatrique à l’issue de leur maladie[2], sans compter les publications quotidiennes qui font état de l’impact psychologique de la crise sanitaire et des différents confinements[3].
C’est dans ce contexte que la FHF demande d’urgence une remise à niveau du financement de la psychiatrie publique. L’évolution minimale du budget de la psychiatrie (ONDAM-psy), fixée à 1,9% par un protocole signé par la FHF et la ministre de la Santé en 2019 est une avancée importante, mais constitue un minimum nécessaire qui ne suffira pas à rattraper le retard subi par le secteur public depuis de nombreuses années.
Afin de compenser le sous-financement historique des établissements de service public, la FHF réitère sa demande d’une remise à niveau des ressources des établissements publics à hauteur de 5% de leur enveloppe. Il est nécessaire que des actes importants soient pris lors de la campagne budgétaire pour 2021 et que le Gouvernement prenne la mesure de l’urgence sanitaire dans laquelle se trouve la psychiatrie publique.
La FHF rappelle enfin la nécessité absolue de faire aboutir la réforme du financement de toute la psychiatrie, pour sortir d’un modèle inéquitable et néfaste pour l’hôpital public qui représente 90% de ce secteur d’activité.
« La psychiatrie publique doit enfin devenir une priorité politique afin de rattraper le retard pris ces dernières années et être en capacité de répondre aux besoins de la population devant les risques déjà identifiés, en particulier les nouveaux troubles liés à la COVID-19. Pour que le secteur public puisse jouer son rôle de « bouclier sanitaire » et préserver au mieux la santé mentale des Français, il nous faut de toute urgence mieux financer et financer à la hauteur des besoins. »
Frédéric Valletoux, Président de la Fédération hospitalière de France
[0] Les parcours dans l'organisation des soins de psychiatrie, Cour des comptes, 16 février 2021
[1] Les établissements de santé - édition 2020, p.164, DREES
[2] Près de 20% des patients développent un trouble psychiatrique dans les trois mois suivant un Covid-19, dépêche APM, 10 novembre 2020
[3] Covid-19: l'effet délétère du confinement sur la santé mentale des étudiants confirmé dans une nouvelle étude, Dépêche APM, 12 février 2021
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