Les médicaments sont par nature des substances actives biologiquement et il est légitime que l'autorité chargée de la qualité des milieux- eaux, sols – disposent des connaissances nécessaires afin de prévenir le risque pour et par l'environnement dû à la présence de ces molécules, à l'instar des autres substances chimiques dangereuses pour l'environnement : phytopharmaceutiques, biocides, substances hautement préoccupantes du règlement REACH.
La régulation du médicament à usage humain comme du médicament vétérinaire relève essentiellement du droit communautaire. Elle repose sur l'autorisation de mise sur le marché (AMM), acte juridique pivot de la régulation, qui a pour objectif essentiel de garantir l'efficacité et la sûreté pour le patient du produit autorisé. Le concept de risque environnemental a été introduit récemment dans le droit du médicament. Cependant l'analyse des textes et des pratiques montre que le système de régulation ne permet pas de fournir les informations nécessaires à la gestion et à la prévention du risque environnemental. Les raisons de ces insuffisances résident essentiellement dans un droit dérogatoire du médicament vis-à-vis de l'environnement comparé à celui des autres substances chimiques susmentionnées.
L'amélioration de la connaissance de l'impact environnemental des médicaments suppose d'abord un système d'évaluation du risque qui permette réellement une connaissance des effets sur l'environnement ; elle réclame ensuite une obligation de rattrapage pour les médicaments existants, point essentiel puisqu'il concerne 95 % des médicaments utilisés pour lesquels aucune obligation en matière de connaissance environnementale n'est prévue ; elle implique enfin l'intégration dans le rapport bénéfice-risque, base de la décision d'AMM, du risque pour l'environnement, et cela pour le médicament à usage humain, puisque le médicament vétérinaire a déjà adopté ce principe.
D'autres recommandations, de nature diverse, visent également l'amélioration de la connaissance de l'impact environnemental : la banalisation des analyses des résidus de médicaments dans les rejets des stations d'épuration importantes et dans les milieux récepteurs sensibles, la présence d'écotoxicologues dans les instances de régulation. Un point majeur intéresse une catégorie de produits pharmaceutiques, les cosmétiques, dont le droit ignore totalement la prise en compte de l'environnement. Par ailleurs, la recherche pourrait utilement bénéficier d'un programme national sur le thème « produits pharmaceutiques et environnement » qui assurerait lisibilité et promotion de ce secteur de la connaissance.
En outre, la pression des résidus de médicaments dans l'environnement peut être réduite par des dispositions simples, sans coût excessif. Ces mesures intéressent les rejets de l'industrie pharmaceutique, la gestion des déchets à risque en hôpital, le système Cyclamed, l'optimisation de l'usage des antibiotiques dans certaines filières animales. L'ensemble de ces recommandations, d'abord destinées au ministre chargé de l'environnement, peuvent être utilement partagées par le ministre chargé de la santé en raison du lien étroit entre état écologique du milieu aquatique et qualité de la ressource en eau potable, comme de la relation entre dégradation des écosystèmes et signal pour la santé publique.
[1] Voir notamment le dossier publié dans TH : Les effluents liquides des établissements de santé : état des lieux et perspectives de gestion (I - État des lieux) Les effluents liquides des établissements de santé : état des lieux et perspectives de gestion (II - Traitement)Devenir d’œstrogènes et de bêtabloquants dans les filières eau de dix stations d’épuration biologiques [...]