courrier du 13 octobre 2003 de la fhf adressé aux députés et sénateurs sur les positions adoptées sur le dossier t2a.

Date de publication : 27 Novembre 2003
Date de modification : 27 Novembre 2003

Paris le 13 octobre 2003

Madame et Monsieur le Sénateur,

Madame et Monsieur le Député,

Dans le cadre du Plan Hôpital 2007 présenté par le Gouvernement comme un pacte de modernité avec les hospitaliers, il a été décidé de mettre en oeuvre la tarification à l'activité dès le 1er janvier 2004 dans les établissements de santé publics et privés.

La Fédération Hospitalière de France (FHF) qui représente la quasi-totalité des hôpitaux publics (environ 1000 établissements) a été la première composante du monde hospitalier à avoir prôné une telle réforme dont l'objectif est d'impulser une nouvelle dynamique de gestion par un mode de financement plus stimulant et équitable, dans un contexte marqué par la recomposition du paysage sanitaire et la maîtrise des dépenses de santé.

La FHF, en accord total avec les Conférences de Directeurs et les Conférences de Présidents de CME, soutient donc aujourd'hui la volonté des Pouvoirs Publics de mettre en oeuvre cette réforme dès l'année prochaine.

Cette adhésion souffre néanmoins d'un point de divergence fondamental avec les autorités ministérielles : il concerne le mécanisme de régulation à appliquer pour faire respecter l'objectif national de dépenses hospitalières fixé chaque année pour les activités de médecine, chirurgie et obstétrique. Plus précisément, il s'agit de savoir si la régulation doit s'opérer sur deux enveloppes séparées - l'une correspondant aux dépenses du secteur public, l'autre à celles des cliniques - ou bien sur une enveloppe unique et totalement fongible, commune aux deux secteurs d'hospitalisation.

C'est cette dernière solution qui est retenue aujourd'hui par les autorités ministérielles, contre l'avis unanime de l'ensemble de la communauté publique hospitalière. Celle-ci tient à exprimer avec force et détermination son rejet d'une telle proposition au regard des effets pervers quelle ne manquera pas de produire.

En effet, il existe des différences notoires entre les deux secteurs d'hospitalisation, en termes de contraintes de gestion, d'obligations réglementaires, et de logique de fonctionnement. Force est de constater que la réactivité des établissements publics ainsi que leurs marges de manoeuvre sont limitées par leurs obligations d'ordre statutaire, les exigences du code des marchés public et la mise en oeuvre d'un certain nombre de dispositifs législatifs et réglementaires qui pèsent sur leurs coûts de production : à titre d'exemple, la RTT médicale et la directive européenne imposant un repos de sécurité et la limitation de la durée du travail médical à 48 H gardes comprises, ne s'appliquent qu'aux hôpitaux publics. Il est donc clair que ces derniers partent avec un sérieux handicap en termes de « productivité », face à des cliniques qui bénéficient d'une réelle souplesse de gestion leur permettant d'acquérir de nouvelles parts de marché dans un contexte de plus en plus concurrentiel. Dans ces conditions, la régulation des dépenses hospitalières sur une enveloppe unique totalement fongible aurait pour conséquence de transférer une partie des crédits publics vers les cliniques, au détriment du service public hospitalier.

Une telle situation engendrerait des conséquence politiques lourdes : la réduction de l'offre de soins publique, consécutive aux transferts financiers évoqués plus haut, se traduirait concrètement par une réduction de l'emploi hospitalier. Dans un contexte déjà fortement fragilisé par les tensions budgétaires, il est à craindre que de telles perspectives ne débouchent sur de graves conflits sociaux : qui en assumera alors la responsabilité politique ?

Ainsi, c'est pour empêcher de telles conséquences, - difficilement gérables quel que soit le Pouvoir en place - qu'il est nécessaire d'appliquer une régulation des dépenses hospitalières sur deux enveloppes séparées, et ce, tant que les « règles du jeu » qui conditionnent les performances et le dynamisme des établissements ne sont pas identiques pour tous.

Du reste, on peut noter que les Pouvoirs Publics eux-mêmes ont reconnu la réalité des différences entre les deux secteurs d'hospitalisation, en décidant de fixer des tarifs propres à chacun d'entre eux pendant une période transitoire. Cette distinction des tarifs résulte de l'impossibilité actuelle d'intégrer les honoraires des médecins libéraux dans les tarifs des cliniques privées au regard d'un certain nombre d'obstacles politiques et techniques. Il paraît donc cohérent de conserver cette même logique de distinction en matière de régulation.

Enfin, je me permets d'attirer votre attention sur le fait que ce refus d'une enveloppe de régulation unique par la communauté hospitalière publique ne doit pas être interprété comme la peur d'évoluer vers une harmonisation totale des modes de financements public et privé, que M.MATTEI appelle aujourd'hui de ses voeux. Les hospitaliers publics souscrivent en effet à un tel objectif- cible, pour autant qu'une phase de transition permette d'assurer effectivement cette convergence, dans le cadre d'un schéma de régulation réaliste et responsable qui tienne compte des spécificités de chaque secteur d'hospitalisation, de l'ensemble des contraintes politiques économiques et sociales, et de l'évolution de la gouvernance hospitalière.

Ce n'est qu'à cette condition que les hospitaliers publics pourront s'engager de façon efficace, déterminée et sereine, dans le nouveau mode de financement des établissements de santé.

Vous trouverez ci-joint, à toutes fins utiles, une note précisant les positions de la communauté publique hospitalière sur ce sujet.

En espérant que vous serez sensibles à cette argumentation et en restant à votre disposition pour un échange plus approfondi si vous le souhaitez,

Je vous prie de croire, Madame et Monsieur le Sénateur, Madame et Monsieur le Député, en l'assurance de ma considération distinguée.

Gérard VINCENT.

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