Claude Rambaud, présidente de l'association Le LIEN organisatrice des États généraux des infections nosocomiales et de la sécurité des patients rêvait d'une année 2013 "trois étoiles" pour la sécurité des patients. La présence de la ministre de la Santé et le lancement du premier Programme national pour la sécurité des patients (PNSP) lors de cet événement majeur, sont plutôt de bon augure.
Dans son discours, Marisol Touraine a réaffirmé que "la qualité ne s'oppose pas à la maîtrise des coûts" et rappelé les traumatismes induits par les infections associées aux soins aussi bien pour les patients que pour le système de santé. Ainsi, pour aller plus loin que le dispositif de signalement dont la France s'est déjà dotée, elle a lancé ce programme comme une approche globale et coordonnée à tous les niveaux. Un cadre à partir duquel les politiques sectorielles de qualité et de sécurité des soins pourront s'articuler entre elles, en considération des expertises du terrain, a-t-elle argumenté.
Un programme, quatre axes et 90 actions opérationnelles
Quatre axes, déjà annoncés en 2011 dans le cadre de la semaine nationale de la sécurité des patients (lire notre sujet du 24/11/2011) composent dès lors ce PNSP 2013-2017 :
- renforcer l'information du patient et la relation soignant-soigné afin de rendre le patient co-acteur de sa sécurité,
- améliorer la remontée d'information dans une logique d'apprentissage et d'amélioration des pratiques via l'analyse des causes systémiques et le retour d'expériences,
- développer la culture de la sécurité dès le cursus d'études des professionnels (formation initiale et développement professionnel continu) via des méthodes pédagogiques innovantes comme la simulation en santé et avec l'accompagnement de structures régionales d'appui à la qualité,
- développer la recherche sur la sécurité des soins en associant tous les champs disciplinaires, y compris les sciences sociales et l'économie.
Le programme est conçu en transversalité. En ce sens, il est conjointement piloté par la DGOS et la Direction générale de la santé (DGS) en association avec la Haute autorité de santé (HAS). Et il vise à donner sens, cohérence et lisibilité aux nombreuses actions en cours ou projetées : certification des établissements de santé, développement des indicateurs qualité, accréditation des médecins des spécialités à risque, travaux d'optimisation du parcours de soins, élaboration de référentiels activités et compétences des professionnels de santé... D'où la définition dans le PNSP de 90 actions opérationnelles, assorties de livrables et d'un calendrier précis. 90 actions déployées dans l'ensemble des secteurs de prise en charge et pour lesquelles les ARS joueront un rôle pivot.
La pertinence en fil conducteur des états généraux
Cette 4e édition des états généraux du LIEN avait pour thème la pertinence dans toutes ses composantes tant médicale qu'économique. Les fédérations hospitalières ont ainsi débattu sur la pertinence de l'acte, évoquant une nécessaire adaptation de la tarification ou encore une réforme des études médicales et soulignant le besoin d'indicateurs de mesures pour parvenir à un bon équilibre et une pertinence de parcours. Celui des aînés a notamment été discuté, autour de la notion de choix (à distinguer du souhait). La HAS a quant à elle prôné le besoin de référentiels. Quant au médicament, il a été décortiqué sous toutes les coutures, de la fabrication du générique à l'usage des antibiotiques face à la montée en puissance des Bactéries multi-résistantes (BMR). Sur ce plan, la DGS travaille, entre autres, à l'identification d'un socle d'antibiotiques à dispensation contrôlée, a indiqué Jean-Yves Grall, son directeur. L'Alliance contre le développement des BMR aux antibiotiques (AC2BMR) milite quant à elle pour une professionnalisation de la prescription et une justification des traitements. Enfin l'innovation a trouvé sa place à la tribune : robotique dans le dépistage précoce et rapide des infections, matérielle via l'installation d'éléments en cuivre dans les hôpitaux ou encore médicale via l'exemple de la phagothérapie, traitement non autorisé en France et présenté comme solution à certaines impasses thérapeutiques.
"Sur la base de la vision de précurseurs, de la volonté politique, d'un cadre scientifique tracé par les sociétés savantes et de l'émergence d'une profession de terrain, la révolte des usagers a permis d'être le catalyseur positif de ce grand dessein", résume ainsi Pierre Parneix, président du Centre de coordination de la lutte contre les infections nosocomiales du Sud-Ouest dans le dossier de presse des états généraux. Un programme de lutte officiel est certes né ce 14 février cependant le LIEN ne baissera pas la garde. Et de maintenir dans cette optique sa demande d'une mission interministérielle au risque infectieux, "pour donner du liant", a insisté Bruno Grandbastien, médecin responsable de l'unité épidémiologie au CHU de Lille.
Pia Hémery, à Paris